Le Street Art en Afrique : exploration des statuts juridiques et des défis contemporains

Le Street Art en Afrique est un mouvement artistique en constante évolution, ayant connu une transformation remarquable, passant d’un mouvement underground à une forme d’expression reconnue. Malgré cette reconnaissance, il existe de nombreuses contradictions et défis qui l’accompagnent.

Les racines du Street Art remontent aux mouvements populaires illégaux des années 1960, où il était considéré comme un art éphémère. Cependant, grâce à l’introduction de nouvelles techniques, cet art s’est répandu dans le monde entier, adoptant des styles variés qui occupent désormais une place prépondérante dans le paysage artistique actuel.
Les institutions culturelles, les galeries d’art et les collectivités ont également intensifié leurs efforts pour valoriser ces pratiques, attirant ainsi un public toujours plus nombreux et enthousiaste.

Malheureusement, des paradoxes émergent lorsque l’on observe les campagnes anti-graffiti qui ont vu le jour dans les années 1990 et qui continuent de s’intensifier aujourd’hui. Certains groupes protestent contre l’art urbain, le considérant comme une nuisance.
De plus, son intégration sur le marché de l’art et sa réutilisation commerciale suscitent un mécontentement général envers ces pratiques désormais légales. Cette évolution caractéristique du XXIe siècle a entraîné une augmentation des ventes aux enchères, mais également le vol d’œuvres directement dans la rue.

Toutes ces problématiques soulèvent des questions sur la place et la propriété intellectuelle du Street Art en Afrique, ainsi que sur les droits d’auteur et le droit moral des artistes, étant donné son évolution au sein des villes africaines.

Afin de comprendre pleinement le Street Art en Afrique, il est essentiel d’examiner son statut juridique et les préoccupations des acteurs de ce mouvement artistique dans leur globalité. Il convient également d’aborder les aspects liés à la conservation et à la préservation de ce patrimoine artistique, tout en tenant compte des limites des juridictions contemporaines face à un art nouveau qui bouscule les règles établies. Nous explorerons donc les caractéristiques de la jurisprudence entourant cet art contestataire, qui cherche à se faire une place dans le monde de l’art légitime.

Street Art en Afrique : entre illicité, patrimoine culturel et nouvelles perspectives légales

Le street art en Afrique est bien plus qu’une simple forme d’expression artistique. Il transcende les frontières, défie les conventions et fait vibrer les rues des villes africaines. Cependant, cette forme d’art unique pose des défis juridiques majeurs, remettant en question les normes traditionnelles du droit dans chaque pays. Comment concilier l’illicéité inhérente au mouvement avec la nécessité de protéger et de pérenniser le street art en tant que patrimoine culturel ?
C’est là une question complexe à laquelle les juristes et les acteurs du milieu artistique devraient penser en Afrique.

L’une des problématiques clés réside dans la détermination des titulaires des droits sur les œuvres. Qui bénéficie de la protection légale lorsque l’acte de création lui-même est illicite ?
Cette question soulève également la difficulté de concilier les droits des différents acteurs et de bâtir une législation adaptée au street art dans son ensemble, tout en tenant compte de sa nature éphémère.

Il est essentiel d’examiner les cadres juridiques existants pour comprendre les implications légales du street art en Afrique. Bien que le droit se soit intéressé relativement récemment à cette forme d’art, certains fondements juridiques généraux s’appliquent à lui. Toutefois, la protection complète des œuvres de street art, notamment des graffitis, est souvent remise en question en raison de leur caractère illicite et éphémère. Le street art présente des particularités qui le rendent complexe du point de vue juridique. Il englobe une multitude de formes d’expression artistique, de lieux de création, de techniques et d’artistes, brouillant les frontières entre l’art et le droit. Face à l’ampleur du mouvement et à sa visibilité publique croissante, il est crucial de trouver un équilibre entre les différentes parties prenantes.

Les cadres juridiques principaux applicables au street art se concentrent sur la distinction entre les biens meubles et les biens immeubles. La question centrale est de déterminer si une œuvre réalisée sur un support mural est considérée comme mobile ou immobile. Traditionnellement, les biens immeubles bénéficient d’une meilleure protection, tandis que les biens meubles sont davantage sujets à des déplacements et considérés comme moins précieux. Cependant, cette distinction soulève des interrogations quant à la pertinence de ces critères pour le street art, où des œuvres déplacées peuvent souvent avoir une valeur supérieure à une œuvre fixe.

Le street art soulève également des questions concernant la liberté d’expression et la sécurité juridique des artistes. Alors que la création artistique est considérée comme libre, le vol et la réutilisation des œuvres restent des préoccupations majeures. Malgré son caractère illégal, il existe une volonté de permettre au street art de s’épanouir légitimement. Certaines municipalités africaines créent ainsi des espaces d’expression libre afin de favoriser la créativité artistique tout en respectant les règles de l’ordre public, de la dignité humaine et des bonnes mœurs, à l’image du large mur que le Bénin réalise actuellement.

Les villes africaines pourraient promouvoir la réalisation de graffitis dans un cadre légal, en offrant des espaces dédiés et en encourageant le respect du voisinage et des règles de sécurité. Cette approche favoriserait le développement du street art dans des lieux appropriés et en constante évolution, ouvrant ainsi la voie à un avenir prometteur pour cette forme d’art.

Cependant, certains continueront de soutenir le caractère illicite des graffitis traditionnels, les distinguant ainsi du street art légal et protégé. Néanmoins, il convient de souligner que le droit de la propriété intellectuelle s’applique aux graffitis, qu’ils soient licites ou non. Les pièces de street art, de par le monde, intégrées aux parcours artistiques ou aux expositions, contribuent à une vision positive de cette forme d’art aux yeux des juges, qui reconnaissent son importance institutionnelle et sa diversité.

Le street art, acte de création spontané et original, fait débat quant à sa nature artistique et sa perception dans l’espace urbain. Considéré par certains comme une dégradation, il suscite des interrogations sur son statut légal et son acceptation sociale. Cependant, une évolution récente montre que de nombreux artistes travaillent désormais en règle, en demandant les autorisations nécessaires pour réaliser des œuvres plus construites et esthétiques. Malgré cela, le conflit persiste entre le droit à la création et à la liberté d’expression d’une part, et le droit à la propriété publique ou privée de l’autre.

Il convient de rappeler que de nombreuses œuvres aujourd’hui considérées comme des chefs-d’œuvre ont également été contestées à leur époque. Des tableaux tels que « Le Déjeuner sur l’herbe » de Manet, « L’Origine du monde » de Courbet ou encore « La Fontaine » de Duchamp ont suscité des scandales et des rejets. Pourtant, ces mêmes œuvres sont désormais admirées dans les plus grands musées du monde, attirant des millions de visiteurs chaque année.

Mais la question qui se pose aujourd’hui est de savoir si le street art, exposé publiquement à des spectateurs parfois non avertis, peut-il également évoluer vers une telle réception favorable ?

La question de juger au cas par cas ce qui relève de l’art ou de la dégradation se pose inévitablement. Bien que certains graffitis méritent d’être préservés en raison de leur esthétique ou de leur message profond, ils peuvent néanmoins être perçus comme une atteinte aux biens des propriétaires et devraient donc être effacés s’ils ne conviennent pas à l’environnement dans lequel ils sont réalisés.
Certains évoquent même une « artification » par la transgression, suggérant ainsi une normalisation et une acceptation des pratiques illégales, considérées comme des propositions artistiques acceptables. Cependant, cette tolérance soulève la question de l’acceptation d’une simple signature sur un mur qui ne lui est pas destiné au prétexte que c’est de l’art.

En réalité, cette « artification » est aussi une forme de sélection. Des artistes tels qu’Ernest Pignon-Ernest, Banksy, Invader ou encore Blek le Rat, dont les œuvres sont souvent réalisées de manière illégale, méritent-ils une place dans l’espace urbain en raison de leur impact artistique et de leur contribution aux arts plastiques ? Plus une proposition artistique est puissante et proche des arts traditionnels, plus elle est généralement acceptée.

Ainsi, la consécration et la protection de cet art éphémère, oscillant entre légalité et illégalité, sont possibles par le biais de l’acceptation.

Il s’agit d’inscrire durablement ce qui est éphémère, de donner une valeur marchande à ce qui était gratuit et de prendre au sérieux ce qui semblait être une simple provocation ou un jeu au départ. Cette interaction entre l’art contemporain, les institutions, les artistes et le public constitue une nouvelle étape vers une transformation idéale, voire idéalisée, du street art et du graffiti.

La créativité débridée : le Street Art en Afrique et les défis de sa protection juridique

L’art urbain est une forme d’expression artistique à part entière, qu’il soit pratiqué de manière légale ou illégale. Les créations artistiques qui en découlent jouissent naturellement du droit de propriété intellectuelle et de la paternité de l’artiste sur son œuvre, ainsi que des droits qui y sont associés. Toutefois, le street art soulève des interrogations légitimes en raison de la nature souvent anonyme de ses artistes. Malgré cela, l’art urbain a acquis un statut plus officiel de nos jours.

Les artistes de street art en Afrique sont de plus en plus reconnus, et les festivals leur offrent une vitrine pour mettre en valeur leurs techniques et créations. Certains d’entre eux connaissent un succès grandissant, propulsant ces artistes au rang des plus grands de notre époque dans le monde de l’art contemporain.

Le street art en Afrique est devenu un véritable patrimoine, attirant l’attention des juristes et suscitant un intérêt croissant de la part des amateurs, du public et des institutions officielles. Cependant, la protection juridique du street art se heurte à plusieurs obstacles en raison de sa nature transgressive et souvent illégale. Bien que théoriquement protégé en tant qu’œuvre artistique, le street art peut soulever des débats sur le droit de propriété, qu’il s’agisse de propriété publique ou privée.

Les spécialistes du droit, les sociologues et les historiens de l’art cherchent à nuancer ces notions fondamentales afin de déterminer comment réagir face à un art subversif qui bouscule les codes établis. Une question cruciale se pose : comment protéger le street art et ses auteurs grâce au droit d’auteur, et quelles formes de protection peuvent assurer une préservation à long terme ?

Une difficulté majeure du street art réside dans le fait que les artistes ne peuvent pas revendiquer leurs droits si leurs œuvres sont condamnées ou détruites, étant donné que l’acte et le contexte de réalisation sont souvent illégaux. Cette situation soulève la question de l’opposition entre le street art et le droit d’auteur, illustrée par le principe selon lequel nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude.

Les origines du droit d’auteur remontent à la cour du roi, où il était initialement instauré pour accorder certains privilèges aux libraires et aux éditeurs, leur permettant de contrôler les publications et de les rémunérer. D’un autre côté, le street art se veut rebelle, populaire et réalisé en toute illégalité, souvent sur des supports qui n’appartiennent pas aux artistes. À première vue, rien ne semble lier ces deux domaines. Pourtant, une œuvre d’art, qu’elle soit réalisée dans l’espace public ou non, est une création artistique dotée d’un style, d’une esthétique et d’un message qui la rendent automatiquement protégeable par le droit d’auteur. Dans l’espace public, le droit d’auteur coexiste avec d’autres droits, permettant ainsi une vie en société respectant les règles et autrui.

Le principal obstacle au droit d’auteur dans le cas du street art en Afrique est le droit des propriétaires privés. Le support sur lequel l’œuvre est réalisée n’appartient pas à l’artiste, et ce dernier ne bénéficie pas toujours d’une autorisation pour la création de son œuvre. Cette situation crée une distinction entre les droits de l’auteur et du propriétaire, régis respectivement par la propriété intellectuelle et le droit des biens. L’artiste a des droits sur l’œuvre réalisée, tandis que le propriétaire a des droits sur le support qui lui appartenait avant la réalisation de l’œuvre. Lorsqu’une œuvre est achetée, l’acheteur ne peut en aucun cas modifier son contenu, mais peut en revanche en disposer comme bon lui semble.

Lorsqu’une autorisation est donnée, les conflits sont souvent évités grâce à la conclusion d’un contrat entre les différentes parties, attestant de l’autorisation accordée à l’artiste pour réaliser son œuvre sur une propriété privée. Cela fonctionne notamment lors de festivals ou lors de la constitution d’un mur officiel, comme c’est le cas du grand mur du port qui s’étend de plus en plus au Bénin, où une autorisation étatique est requise, impliquant les artistes et l’organisation pour la mise à disposition d’un mur. Dans ce cas, l’artiste conserve ses droits sur l’image, et le propriétaire doit demander l’autorisation de l’artiste pour reproduire ou effacer l’œuvre. Ce type de contrat est utilisé pour toutes les surfaces privées dans le cadre d’événements officiels.

En revanche, lorsqu’une œuvre est réalisée illégalement, deux droits exclusifs mais tout à fait légitimes entrent en conflit : le droit moral dont bénéficie l’auteur et qui trouve toute sa place dans le cas du street art, et le droit du propriétaire. La résolution de ces différends reste un défi, mais il est essentiel de trouver un équilibre entre la protection des œuvres et la nécessité de respecter la propriété privée.

Le street art en Afrique est un mouvement artistique en pleine expansion, mettant en avant la créativité et l’expression de la culture africaine dans les rues. La protection juridique de ces œuvres reste un défi, mais les juristes, les artistes et les propriétaires travaillent ensemble pour trouver des solutions équitables. Il est essentiel de reconnaître la valeur artistique et culturelle du street art en Afrique et de préserver ces créations uniques pour les générations futures.

Vers une approche novatrice : protéger et valoriser le Street Art en Afrique

Le street art en Afrique est une forme d’expression artistique à la fois éphémère et rebelle, mais il se heurte souvent aux contraintes légales liées aux droits d’auteur et à la propriété intellectuelle. La nature éphémère du street art pose des défis particuliers en matière de protection et de propriété.

Pour les artistes de street art, il est essentiel d’obtenir la reconnaissance de leur droit moral sur leurs œuvres. Cela leur permet de s’opposer à la destruction de leurs créations et de veiller à leur entretien. Cependant, cela peut poser des problèmes économiques pour les commanditaires qui ne disposent pas toujours des budgets nécessaires pour préserver ces œuvres éphémères.

Certaines villes africaines ont adopté une approche innovante pour remédier à cette situation. Elles ont mis en place des contrats de renonciation et de cession des droits moraux sur les œuvres de street art. Ainsi, la ville devient propriétaire des fresques en tant que support matériel, tandis que les artistes cèdent leurs droits patrimoniaux. Ces contrats, sous forme de conventions tripartites, permettent de définir les conditions de réalisation d’une fresque dans un cadre officiel, tout en assurant une rémunération équitable pour les artistes.

De plus, les contrats de licence peuvent être envisagés pour les œuvres susceptibles d’apparaître dans des clips, des vidéos ou des films tournés dans la ville. Cette approche offre une opportunité aux artistes de bénéficier d’une plus grande visibilité et de soutien financier, tout en renflouant les caisses de la ville.

Il est important de noter que le droit moral de l’artiste est considéré comme inaliénable et imprescriptible aux yeux de la loi. Aucun contrat ne peut donc priver l’artiste de ce droit. Cette protection vise à maintenir l’indépendance de l’artiste et à lui permettre de garder le contrôle sur son œuvre, en tant qu’expression de son esprit et de son génie créatif.

Malgré les tentatives d’encadrement, la valeur des contrats dans le domaine du street art reste fragile et incertaine. En cas de litige, les parties concernées peuvent se tourner vers les tribunaux compétents pour trouver une résolution, mais il est préférable de favoriser une résolution amiable afin d’éviter des conflits longs et coûteux.

Il est intéressant de s’inspirer du modèle américain, où le Copyright Act vise à protéger les arts visuels et à encourager la créativité artistique. Ce cadre juridique accorde des droits exclusifs aux artistes, tant que leur œuvre n’est pas réalisée sur un support déjà protégé par des droits d’auteur. Cependant, la condition de fixation pose un défi pour le street art en raison de sa nature éphémère.

Le droit de propriété artistique et l’intégrité des œuvres sont des préoccupations majeures pour les artistes du street art. Dans cette optique, le VARA (Visual Artists Rights Act) offre une protection intéressante en ce qui concerne les droits de propriété et d’intégrité des œuvres signées ou réalisées avec autorisation. Cependant, cette protection s’avère inefficace lorsque les œuvres sont volées, dégradées ou détruites.

Les œuvres d’art urbain réalisées dans l’espace public ne bénéficient pas automatiquement de cette protection, et les propriétaires ont parfois le droit de les transférer ou de les déplacer sans que l’auteur puisse s’y opposer. Malgré les bonnes intentions du VARA, il ne répond pas entièrement aux contraintes spécifiques du street art et du graffiti.

Dans de nombreux pays, y compris en Afrique, les nouvelles limites imposées par le droit pour l’art urbain risquent de dissuader les commanditaires potentiels. La facilité de réalisation des œuvres de street art, comparée à d’autres formes artistiques plus coûteuses, fait craindre aux commanditaires un poids économique à long terme.

Ces préoccupations sont particulièrement pertinentes pour les villes qui pourraient ne pas être en mesure de répondre aux demandes des artistes et de leurs ayants-droit en matière de restauration et de préservation des fresques. Bien que l’éphémère soit souvent considéré comme une caractéristique intrinsèque du street art, il peut également constituer un frein à la préservation des œuvres dans le temps.

Une piste intéressante pour résoudre ces problématiques consiste à créer une exception législative adaptée aux particularités du street art. Cette approche impliquerait la mise en place d’une autorité compétente et administrative, composée d’experts en art urbain, de galeristes, d’organisateurs d’événements street art, de conservateurs, de professeurs d’université, de représentants municipaux, ainsi que d’associations de quartiers et de résidents.

Cette « superintendance aux biens culturels » serait chargée de décider de la valeur des œuvres, de leur éventuel déplacement, restauration, effacement ou destruction. Les œuvres les plus menacées bénéficieraient d’une attention prioritaire en fonction des budgets et des intérêts exprimés lors de discussions. Cette approche s’apparenterait à la gestion des Monuments Historiques, permettant de patrimonialiser rapidement les œuvres de street art.

Cependant, cette proposition soulève des questions sur la possible publicisation excessive, l’institutionnalisation et l’appropriation privée des œuvres, ce qui pourrait susciter des débats. Malgré les limites inhérentes à ce système encore embryonnaire, cette approche semble rassurante pour la préservation des œuvres et la libération des contraintes pesant sur les artistes.

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