L’art contemporain africain est un secteur dynamique mais qui reste encore trop méconnu sur le continent et dans le monde. Les artistes talentueux ne manquent pas, mais le public fait souvent défaut, notamment le jeune public. Pourtant, faire découvrir ces arts innovants dès l’école serait enrichissant à plus d’un titre pour les élèves. C’est pourquoi il apparaît indispensable de créer des partenariats scolaire entre les écoles primaires et maternelles et les institutions dédiées à l’art contemporain en Afrique.
Tout d’abord, ces partenariats scolaires permettraient de démocratiser l’accès à la culture et à l’art dès le plus jeune âge. En effet, les inégalités d’accès à l’éducation artistique restent criantes sur le continent. Collaborer avec les écoles donnerait la possibilité à tous les enfants de découvrir le foisonnement créatif africain contemporain, quel que soit leur milieu social et culturel.
De plus, cette découverte enrichirait leur parcours éducatif en apportant une dimension active et concrète, complémentaire aux savoirs académiques transmis en classe. Observer des œuvres, échanger avec un artiste, créer avec ses mains : ces expériences actives sont fondamentales pour l’apprentissage à cet âge.
Par ailleurs, la confrontation avec des formes d’expression novatrices ne pourrait que stimuler l’imagination débordante des enfants. Loin des modèles traditionnels parfois rébarbatifs, l’art contemporain ouvre de nouveaux horizons créatifs. C’est une invitation à oser expérimenter, à penser différemment.
Ainsi, le rapprochement entre les écoles et les lieux dédiés à la création émergente apparaît comme une évidence à approfondir rapidement. Mais comment concrétiser ces partenariats scolaires ?
Pour être fructueux, ces partenariats scolaires doivent reposer sur une démarche de co-construction entre les institutions culturelles et scolaires. Chacun doit y trouver un intérêt et s’investir pleinement. Des réunions préalables sont donc indispensables pour bien définir les objectifs et modalités du partenariat.
Côté école, il est primordial d’arrimer ces projets aux programmes scolaires pour leur donner sens: par exemple travailler la couleur en arts visuels, ou l’observation scientifique. Les enseignants doivent être parties prenantes pour exploiter au mieux les apports de ces collaborations.
Du côté des institutions culturelles, l’enjeu est de rendre leur programmation accessible aux jeunes publics, via des visites et ateliers adaptés. Leurs équipes doivent se former à ces approches. Un travail de médiation essentiel est à mener pour créer des passerelles entre l’univers de l’art contemporain et celui des enfants.
Une fois ce travail préalable effectué, des objectifs pédagogiques partagés peuvent être définis. Ils guideront la mise en œuvre des projets communs sur le long terme.
Une fois le partenariat acté, se pose la question de son déploiement concret. L’organisation de visites scolaires dans les institutions culturelles en est souvent la première étape. Pour qu’elles soient vraiment formatrices, ces visites doivent être minutieusement préparées.
Tout d’abord, le choix des œuvres et des activités proposées doit être pensé en fonction de l’âge des élèves. Les plus petits nécessitent une approche très sensorielle et ludique, avec peu d’œuvres mais des manipulations. Pour les plus grands, des questionnements plus pointus peuvent être introduits.
Par ailleurs, ces visites doivent s’inscrire dans la continuité des enseignements. Un travail de sensibilisation en amont est capital : lecture d’albums sur l’art, productions plastiques préparatoires, etc. Après la visite, des projets artistiques permettront aux élèves d’approfondir les notions découvertes.
Enfin, le rythme de la visite doit être adapté, avec des temps calmes et des moments plus actifs. La répétition de consignes simples est essentielle. Le fil conducteur doit rester l’éveil de la curiosité et le plaisir de la découverte.
Au-delà des simples visites, la collaboration entre écoles et lieux d’art contemporain peut donner lieu à des projets pédagogiques ambitieux, sur le long cours. Ils permettent d’ancrer plus profondément encore les apports de ce partenariat.
Par exemple, des ateliers de pratique artistique peuvent être menés conjointement sur une période, impliquant à la fois le personnel scolaire et les médiateurs culturels. Les enfants réalisent ainsi des productions en lien avec les démarches découvertes lors des visites.
Autre possibilité: l’accueil d’artistes dans les classes pour des workshops, voire des résidences artistiques au sein des écoles – idéales mais plus rares. Le contact direct avec un créateur contemporain est toujours très inspirant.
En outre, des projets interdisciplinaires peuvent voir le jour, associant plusieurs enseignements à la découverte de l’art d’aujourd’hui: par exemple des lectures et écritures poétiques sur des œuvres, de l’histoire de l’art, des cours de musiques inspirés d’installations sonores, etc.
Chaque projet doit partir des envies des enseignants et des possibilités des structures culturelles pour apporter une réelle plus-value.
Bien sûr, mettre en place de tels partenariats scolaires en Afrique nécessite de prendre en considération les conditions spécifiques des écoles sur ce continent.
Tout d’abord, les classes y sont souvent pléthoriques, avec des moyens matériels limités. Les dispositifs doivent en tenir compte, par exemple en scindant les classes en plusieurs groupes pour les visites.
Par ailleurs, la richesse du patrimoine culturel de chaque pays est à valoriser en parallèle à la création contemporaine. Montrer les liens entre tradition et modernité est essentiel pour une approche pertinente.
En outre, l’enseignement reste malheureusement trop académique dans de nombreuses écoles africaines. Les pédagogies actives promues par les institutions artistiques apportent donc un équilibre salutaire.
Enfin, dans ce contexte, la médiation revêt un rôle central. Des formations des personnels scolaires et culturels doivent renforcer leurs compétences dans ce domaine pour garantir l’efficacité des actions.
L’éducation artistique ne saurait se limiter à l’histoire de l’art. La pratique est essentielle pour expérimenter les gestes créatifs. Elle prend donc une place de choix dans les programmes scolaires, qu’il convient de mettre en avant.
Dès la maternelle, des ateliers d’arts plastiques permettent aux tout-petits de manipuler des matériaux, découvrir des outils, sentir des textures. Peu importe le rendu final, l’essentiel est de laisser libre cours à leur imagination foisonnante.
Plus grands, les élèves peuvent s’initier à différentes techniques comme le dessin, la peinture, le modelage… Ceci en utilisant des matériaux locaux pour un ancrage culturel.
L’expression libre doit rester la règle, sans jugement sur le résultat esthétique. Chaque enfant possède sa propre sensibilité: elle doit s’épanouir. L’enseignant guide le geste mais ne l’impose pas.
Enfin, le temps de la verbalisation permet à l’enfant de structurer sa pensée sur sa production et celle de ses camarades. Analyser pour mieux créer ensuite.
L’histoire des arts visuels est assez peu abordée dans le primaire en Afrique alors qu’elle devrait trouver sa place, à un niveau accessible, dès cet âge. C’est l’occasion de sensibiliser les enfants à la diversité des formes esthétiques ici et ailleurs.
Bien sûr, à l’école maternelle, il s’agit surtout de leur faire découvrir des œuvres de manière Sensorielle, sans souci d’apprentissage académique. Le but est de susciter émotions et questionnements.
Au primaire, quelques repères chronologiques et géographiques peuvent être posés. L’essentiel est toujours de développer le regard et l’imaginaire. On pourra par exemple comparer des masques dogons traditionnels à des masques contemporains inspirés de ceux-ci.
Les productions modernes et contemporaines d’artistes africains sont à mettre en avant pour montrer que l’art est un langage vivant. Et les musées et centres d’art sont des partenaires de choix pour cela.
Ces visites représentent en effet des occasions uniques d’enrichir les apprentissages par une expérience vécue. Mais il ne s’agit pas seulement de visites libres : un projet pédagogique solide en amont et en aval est nécessaire.
Les œuvres contemporaines présentées doivent pouvoir trouver un écho dans le programme scolaire pour donner plus de sens. Et si possible, des ateliers de pratique artistique seront ajoutés pour une approche globale.
Enfin, seule une collaboration suivie entre l’institution scolaire et culturelle permettra de créer ces ponts. Chacun doit y trouver un intérêt et s’impliquer pleinement dans ces projets communs fructueux.
Le rapprochement entre les écoles et les lieux dédiés à la création contemporaine en Afrique apparaît donc plein de promesses. Mais il doit reposer sur des actions soigneusement pensées et coordonnées. Le public scolaire a en effet des spécificités auxquelles ces projets doivent s’adapter.
S’ils sont correctement menés, ces partenariats scolaires peuvent considérablement enrichir le parcours éducatif et artistique des enfants. Ils leur ouvrent de nouveaux horizons créatifs en phase avec leur époque et avec le dynamisme de l’art contemporain africain. Les institutions culturelles et scolaires ont tout à y gagner en mutualisant ainsi leurs ressources.